La musique de l'Harmonie universelle

Responsable(s)

William Dongois

Équipe


Partenaires

Alain PACQUIER, Rencontres Musicales de Saint Ulrich

Hervé BURKEL DE TELL, Centre de musique baroque de Versailles

2014-2016


Présentation du projet

Dans la perspective des performances practices studies, le projet MERSENNE se proposait d’utiliser les trois volumes de l’Harmonie universelle comme une source pour renouveler les connaissances et les savoir-faire sur l’exécution de la musique dans la première moitié du XVIIe siècle en opérant une lecture critique de l’Harmonie universelle selon des modalités originales et en croisant les regards de musiciens praticiens, de musicologues et organologues. Douze séminaires préparatoires ont eu lieu de janvier à avril 2013 au Centre de musique baroque de Versailles et ont permit aux différents participants de (re)découvrir la richesse et la complexité de l’œuvre.

La deuxième phase a consisté à réunir un groupe de musiciens (professionnels spécialisés dans l’exécution de la musique du XVIIe siècle et un groupe d’étudiants de la HEM) afin de passer à l’exécution de compositions issues pour la majorité d’entre elles de l’Harmonie Universelle. Une heure de musique a été enregistrée au couvent Saint Ulrich à Sarrebourg (www.rencontres-saint-ulrich.com) pendant cinq jours. Les partitions réalisées à partir du fac simile de l’Harmonie Universelle et les enregistrements se trouvent sur les pages suivantes. Les résultats obtenus ont été présentés lors de la troisième phase du projet : un colloque international a été organisé en collaboration avec le CMBV en décembre 2014. Dans le cadre du colloque, un concert, filmé par une télévision japonaise, a été donné à la Chapelle Royale avec l’ensemble des Chantres de la maîtrise du CMBV, sous la direction d’Olivier Schnebeli et un ensemble instrumental réunissant des professeurs et étudiants de la HEM liés au projet.

Les consorts de Marin Mersenne

Il est d'usage aujourd'hui, de nommer consort un ensemble d'instruments de même famille. C'est donc le mot anglais qui est utilisé. En France, à l'époque de Mersenne, on parle du « concert » d'instruments.

Dans l'harmonie Universelle, Marin Mersenne va décrire de très nombreux instruments, et à chaque fois, mentionner la famille entière. Il ne mentionne le mélange des familles instrumentales ainsi que le mélange voix/instruments que par allusion dans différentes parties de son ouvrage. Cela tient à la nature de L'Harmonie universelle dont l’objectif premier n’est pas de décrire les pratiques de son époque.

Nous avons donc reconstitué dans la mesure du possible les familles instrumentales décrites par Mersenne, en leur faisant exécuter essentiellement des pièces données en exemple dans L'Harmonie universelle. Ces compositions nous renseignent ainsi indirectement sur l'usage de ces instruments. Nous avons aussi conduit diverses expériences : les « concerts d'instruments » ont ainsi exécuté des danses, fantaisies et airs contenus dans l'Harmonie universelle auxquels nous avons ajouté du répertoire vocal et instrumental avec deux compositions contemporaines de Mersenne, tirées du Manuscrit Deslauriers, (Recueil Deslauriers F-Pn/Rés Vma ms 571) grâce à l’aide précieuse du CMBV que nous remercions pour avoir mis quelques transcriptions à notre disposition.

Nous avons aussi mêlé les instruments à vents aux voix, usage courant et fréquemment décrit dans toute l'Europe de cette époque, et auquel Marin Mersenne fait allusion de temps à autre au détour de ses descriptions.

ANCHES

Les instruments à anches dans l'Harmonie universelle
Jérémie Papasergio, direction

PROPOSITION XXVI
Expliquer la Chalemie, ou la Cornemuse rurale ou pastorale des Bergers, et ses parties.

« Cet instrument est le premier de tous ceux qui usent d'anches, c'est pourquoy ie le fais suivre apres les instrumens à bocal; or ces anches se font de plusieurs matieres, dont la plus simple est d'un chalumeau, ou tuyau de bled, comme est celle que l'on void marquée par [theta][eta][iota] dans la figure qui suit, laquelle est semblable au troisiesme et au quatriesme Chalumeau de la quatriesme. »

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 283.

PROPOSITION XXVIII
Expliquer la figure, la fabrique, et les parties de la Musette et du Tornebout.

« Lors que l'on a ouy la Musette entre les mains de ceux qui en sonnent en perfection, comme fait le sieur des Touches, l'un des Haut-bois du Roy, il faut advoüer qu'elle ne cede point aux autres instrumens, et qu'il y a un singulier plaisir à l'entendre. »

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 288.

PROPOSITION XXXIV
Expliquer la Cornemuse, et les Haut-bois de Poictou auec leur grandeur, leur usage, et leur proportion.

« Cette Cornemuse n'est differente de la Chalemie, dont i'ay parlé dans la 25. Proposition, qu'en ce qu'elle n'a point de petit Bourdon, car elle s'embouche par le porte-vent Z, et a le gros Bourdon Y comme l'autre, mais son Chalumeau R V a huict trous, dont le premier se bouche avec la clef, qui est couverte de sa boëtte. Or ie l'ay icy reservée, afin de la ioindre avec les Haut-bois de Poictou, parce qu'elle entre dans leur concert en qualité de Dessus, afin que l'on voye tous les instrumens d'un concert entier, dont la Basse est brisée en C, afin d'estre plus portative, et d'avoir tous ses trous tellement disposez que l'on puisse les boucher des doigts; ce que l'on ne pourroit faire si ses deux branches estoient continuées en ligne droite. »

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 306.

« Quant a leur Musique [le concert des Hautbois], elle est propre pour les grandes assemblées, comme pour les Balets (encore que l'on se serve maintenant des Violons en leur place) pour les Nopces, pour les Festes des villages, et pour les autres resiouyssances publiques, à raison du grand bruit qu'ils font, et de la grande Harmonie qu'ils rendent, car ils ont le son le plus fort et le plus violent de tous les instrumens, si l'on excepte la Trompette ».

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 304.

Pavanne du second mode transposé pour les Haut-bois, Henry le Jeune

Pavanne du second mode transposé pour les Haut-bois, Harmonie universelle, Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 304.
Hautbois, diapason 520 Hz

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet
 

Chant du quatriesme mode pour les Haut-bois du Poictou, Henry le Jeune

Chant du quatriesme mode, pour les Haut-bois de Poictou (Harmonie universelle, Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 292).
Hautbois du Poitou, diapason 440 Hz.

Fac-similé de l'édition originale
 

Chanson pour la musette, Henry le Jeune

Chanson pour la musette, (Harmonie universelle, Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 292).
Musette et Hautbois, diapason 440 Hz. Cornemuse et bourdon exécuté avec basse de hautbois du poictou et Rauchpfeiffe (hautbois à capsule)

Fac-similé de l'édition originale

 

 Volte du dixiesme mode, Anonyme

Volte du dixiesme mode, Harmonie Universelle pour le dessus, Livre second des chants, p. 166 et volte dite du Tambour in Michael Praetorius/Caroubel, Terpsichore, 1612. Parties intermédiaires tirées de Terpsichore.
Hautbois, transposée en Fa à 520 Hz.

Transcription de la partition pour le projet

 

Participants aux enregistrements et instruments joués

La bande des hautbois

Dessus de hautboit : Schermer d'après Bruxelles (1993) et Robert Cronin, d'après Bruxelles (2014)
Tailles de hautbois : 2 bombardes altos de John Hanchet d'après divers originaux (1995)
Sacqueboute ténor sib 440 Hz, jouée en sol 520 Hz, Ewald Meinl, d’après Schnitzer 1551, copie de 2013 en argent massif
Grande basse de hautbois : Olivier Cottet, d'après Mersenne (2002)

Les hautbois du Poitou

Cornemuse, Dessus, Musette du centre de 20 pouces en buis fabriqué par Didier Fouchères.
Doublure du dessus: Rauchpfeiffe (hautbois à capsule) Eric Moulder d'après Berlin (2005)
Taille : jouée par  un basson alto Eric Moulder d'après Bruxelles (2012)
Basse : jouée par une basse de hautbois du poictou : Fritz Heller, d'après Mersenne (2015)

Ont participé aux enregistrements :

Étudiants de la HEM : Vanessa Monteventi (flûtes), Timea Nagy (flûtes), Julien Ribouleau (sacqueboute)
Participants hors HEM : Feodora Diakoff (flûte et anches), Nicolas Sorzin (anches, cornemuse), Elsa Papasergio (flûtes et anches), Adrien Reboisson (anches).
Les joueurs d'anches et des diverses flûtes ont constitué une seule et même équipe.

CORNETS
Cornets, serpent et sacqueboute dans l'Harmonie universelle
William Dongois (cornet et cornet ténor) & Stefan Legée (cornet ténor et sacqueboute), direction

Le cornet
« Quant à la propriété du son qu’il rend, il est semblable à l’éclat d’un rayon de Soleil, qui paroist dans l’ombre ou dans les tenebres, mors qu’on l’entend parmy les voix dans les Eglises Cathedrales, ou dans les Chapelles. »

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p.  275.

« Le dessus de cornet est plus en usage que les autres parties, à raison que l’on en use dans les Concerts des voix, & avec l’Orgue, pour faire le dessus, lequel est ravissant, quand on en sçait sonner en perfection, comme le sieur Quiclet. ».

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 275.

La sacqueboute
« Or on la nomme Trompette harmonique, parce qu'elle sert de Basse dans toutes sortes de Concerts, comme fait le Serpent et le Fagot. »

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 272.

Le serpent
« Les Musiciens ont inventé plusieurs instrumens pour les mesler auec les voix, et pour suppleer le defaut de celles qui font la Basse et le Dessus, car les Chantres qui ont des Basses assez creuses sont fort rares, c'est pourquoy l'on use du Basson, de la Sacquebute et du Serpent, comme l'on se sert du Cornet pour suppleer celles du Dessus, qui ne sont pas bonnes pour l'ordinaire. Or cet instrument se nomme Serpent, à raison de sa figure, qui a des replis, comme l'animal qui porte ce nom, afin que la longueur qu'il auroit, s'il estoit tout droit, n'incommode point, car il a du moins six pieds de long. »

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 279.

« Or cet instrument est capable de soustenir vingt voix des plus fortes, dont il est si aysé de ioüer qu'un enfant de quinze ans en peut sonner aussi forte comme un homme de trente ans. Et l'on peut tellement en addoucir le son qu'il sera propre pour ioindre aux voix de la Musique douce des chambres, dont il imite les mignardises, et les diminutions, qu'il peut faire de trente-deux notes à la mesure, encore qu'il les faille eviter dans la Musique à plusieurs parties, parce qu'il faut simplement sonner ce qui est dans la partie que l'on entreprend de chanter, ny ayant que la seule descente de l'Octave qui soit permise, comme on la void icy. »

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 281.

Reconstruire un cornet « Mersenne », et à fortiori un concert de cornet « Mersenne » est une gageure à laquelle nous nous sommes appliqués mais qui n'a pas donné les résultats escomptés. Cela explique le peu de place que prend cette famille d'instruments dans les exemples sonores. S'ajoute à cela l'aspect insolite de la fantaisie pour les cornets : une musique étrange qui est loin de la qualité de la fantaisie pour violon ou de celle pour viole, sans parler des danses pour anches qui ressemblent en tous points à la musique des années 1630. Il a été plus facile et plus naturel de jouer quelques danses et surtout de présenter cornets, sacqueboutes et serpent dans leur rôle historique : le doublement des voix humaines.

Sarabande du onzieme mode, Anonyme
Sarabande du onzieme mode. Harmonie Universelle, Livre second des chants, p. 166.
Reconstitution des parties William Dongois, (Diapason 520 et 465Hz)

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

 

O vere digna hostia, Anonyme
O vere digna hostia, Ms Deslauriers 2017.1
Cornets, sacqueboutes et serpent, « colla parte » avec le Concert des voix.
Diapason : 392 Hz pour les voix, serpent à 392 Hz et cornets à 520 Hz.

Transcription de la partition pour le projet

 

Pie Jesu Domine, dona eis requiem, Eustache Du Caurroy

Pie Jesu Domine, dona eis requiem (Canon à 6 voix), Harmonie universelle, Livre septiesme des instrumens de percussion, p 162.
Cornets, sacqueboutes et serpent, « colla parte » avec le « concert des voix ».       
Diapason : 392 Hz pour les voix, serpent à 392 Hz, sacqueboute à 465Hz et cornets à 520 Hz.

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

 

Participants aux enregistrements et instruments joués

Instruments joués :
Cornets 520 Hz, Henri Gohin.
Cornets ténors 465 Hz, Henri Gohin.
Sacqueboutes : Sacqueboute ténor, Ewald Meinl, d’après Schnitzer 1551, copie de 2013 en argent massif, et sacqueboute ténor, Ewald Meinl (copie d'après Drewelwecz, 1595).
Serpent de Christopher Monk à 392 Hz.
Basse de cornet à 465 Hz: Serge Delmas d'après l'instrument du Musée des instruments de Bruxelles.

Ont participé à l'enregistrement :
Etudiant-e-s de la HEM : Timea Nagy (cornet), Julien Ribouleau (cornet ténor et sacqueboute)
Participants hors HEM : Jeremy Papasergio (serpent/cornet basse)

FLÛTES DIVERSES

Les flûtes à bec, flageolets, hautbois dans l'Harmonie universelle
Jérémie Papasergio, direction

Le flageolet :

« Cet instrument [Le flageolet] est l'un des plus gentils, et des plus aysez de tous ceux qui sont en usage, car encore que les chalumeaux, qui se font de tuyaux de bled, ou de plume, ou les cornes de boeuf, ou de belier, que les Bergers mettent au bout d'un baston de sureau creusé, soient aussi aysez à preparer, ils sont neantmoins fort esloignez de sa perfection ».

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 232.

« Mais apres que l'on sçait faire tous les tons, il faut s'accoustumer à la vistesse et à la mesure, afin de faire toutes sortes de passages et de diminutions, et d'user de toutes les douceurs et les mignardises, dont le Flageollet est capable; ce qui ne se peut faire sans la vistesse des doigts, qui doivent boucher et deboucher six ou huict fois les mesmes trous dans le temps d'une mesure pour imiter les diminutions de la gorge, de la Viole, des Luths et des autres instrumens ».

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 232.

L'expérience du 2' avec les flageolets fut intéressante à bien des égards, rapportée aux lieux de répétition et d'enregistrement. Dans la salle de répétition, comme dans la salle d'enregistrement, il était difficile d'évoluer la justesse d'intonation des instruments. L'expérience de jouer ce vaudeville en plein air a donné toute satisfaction et montré que ces instruments prennent leur sens en plein air. L'auditeur d'un mp3 ne peut malheureusement pas se faire une idée de l'intérêt de ces petites flûtes dont la fonction et le charme sont liés au plein air.

Vaudeville pour les Flageollets, Henry le Jeune

Vaudeville pour les Flageollets, (Harmonie universelle, Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 237).
En 2', diapason des instruments 520 Hz et 465 Hz. Rendu sonore : 520 Hz

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

 

Les flûtes douces
« Or l'on fait quatre ou cinq parties differentes de ces Flustes pour un concert entier, qui a cela par dessus toutes les autres Flustes, qu'il imite davantage le concert des voix, car il ne luy manque que la seule prononciation, dont on approche de bien pres avec ces Flustes ».

Livre cinquiesme des instrumens a vent, P 231.

« ie remarque seulement que le son de ces Flustes est iugé si doux par quelques-uns, qu'il merite le nom de charmant et de ravissant, quoy que ie n'estime pas que cette maniere de parler appartienne à d'autres plaisirs qu'à ceux du Ciel, qui descouvrent l'obiet ravissant des bien-heureux, qui ne lassent et qui ne cessent iamais, au lieu que tous les autres ennuyent incontinent, et se tournent en des desplaisirs et des douleurs insuportables, comme sçavent tres-bien les plus solides esprits ».

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 240.

« Ces Flustes sont appellées douces, à raison de la douceur de leurs sons, qui representent le charme et la douceur des voix: on les appelle à neuf trous, parce que le huictiesme, qui est proche de la pate, est double, afin que cet instrument puisse servir aux gauchers et aux droictiers. »

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 238.

« Or ces Flustes font le petit ieu, comme celles qui suivront apres font le grand ieu, mais elles se peuvent toutes accorder ensemble, comme font les grands et les petits ieux des Orgues ».

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 238.

Gavotte pour les flustes douces, attribuée à Henry le Jeune

Gavotte pour les flustes douces, Harmonie universelle, Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 240.

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

Version basse

Version haute

Canarie du dixiesme mode transposé, Anonyme

Canarie du dixiesme mode transposé. Harmonie universelle, Livre second des chants, p. 170.
Parties intermédiaires tirées de Michael Praetorius/Caroubel, Terpsichore, 1612.

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

 

Pavanne du quatriesme mode, Anonyme

Pavanne du quatriesme mode. Harmonie universelle, Livre second des chants, P. 166.
Parties intermédiaires reconstituées à partir de Michael Praetorius/Caroubel, Terpsichore, 1612.

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

 

Participants aux enregistrements et instruments joués

Ont participé aux enregistrements :
Les joueurs d'anches et des diverses flûtes ont constitué une seule et même équipe :
Étudiants de la HEM : Vanessa Monteventi, flûtes, Timea Nagy, flûtes, Julien Ribouleau, sacqueboute
Participants hors HEM : Feodora Diakoff (flûte et anches), Nicolas Sorzin (anches, cornemuse), Elsa Papasergio (flûtes et anches), Adrien Reboisson (anches).

Les flageolets
Dessus : flageolet de Henri Gohin à 464 Hz d'après une Flûte anonyme E.980.2.85 Paris (2010).
Haute-contre: flageolet anonyme du XVIIIième siècle.
Taille: flûte à bec soprano à 464 Hz de Henri Gohin d'après Kinseker Nuremberg (2001).
Basse: flûte à bec alto en sol, Adrian Brown (1992) d'après un anonyme du musée instrumental de Vienne.
Les flûtes
Flûtes Rafi du CRR de Tours, 490 Hz, Francesco Li Virghi d'après Rafi (1999).

Jérémie Papasergio et William Dongois remercient Claire Michon et le CRR de Tours pour le prêt des flûtes à bec.

ORGUE

L'orgue dans l'Harmonie universelle

« Ie mets donc icy ce que les mains les plus adroites et les plus vistes peuvent executer, afin que cet exemple serve d'idée à la perfection du beau toucher, lequel se comprend beaucoup mieux en voyant joüer les excellens Maistres que par aucun discours que l'on en puisse faire. Il faut donc remarquer que cette piece de tablature contient seulement les deux premieres mesures de l'air precedent, c'est à dire le chant qui sert à ces paroles, Tu crois ô beau Soleil: de sorte que la main droite commence à faire ces deux mesures en simples crochuës, tandis que la main gauche tient ferme, et puis la main gauche fait la mesme chose que la droite, laquelle recommence apres pour en faire seize à la mesure, ce que fait aussi la main gauche en son rang. Et puis la droite en fait 32 à la mesure, et la gauche apres: et finalement la droite en fait 64 à la mesure, par lesquelles la gauche finit ces exemples. Surquoy il faut premierement remarquer que ces deux dernieres lignes de Diminution ne sont marquées que par des notes de trente-deux à la mesure, comme les precedentes, au lieu qu'elles doivent estre de soixante et quatre à la mesure; c'est pourquoy il faut adiouster une quatriesme barre, afin qu'elles soient quadruples crochuës, d'autant que l'on n'a point encore de ces notes dans les Imprimeries de Musique. Secondement que le temps de chaque mesure ne dure pas deux secondes minutes, mais seulement autant qu'une fisselle de deux pieds et demi de long penduë à un clou par un bout, qui a une bale de plomb attachée à l'autre, en employe à faire un tour et un retour, dont i'ay parlé fort amplement dans la treize, quatorze et quinziesme Proposition du liure des Mouvemens, et dans le troisiesme des Instrumens à chordes.

Or apres auoir monstré les plus grandes diminutions que les plus excellens Organistes peuvent faire sur l'Orgue (car bien que l'on en puisse encore faire de plus grandes par le moyen des barillets, neantmoins elles seroient trop confuses, ou trop vistes, puis que l'oreille et l'imagination ne peuvent pas mesme comprendre celles de 64 notes de la mesure binaire, ou les 48 de la ternaire) ie veux adiouster une remarque particuliere des tuyaux bouchez, laquelle merite la Proposition qui suit ».

Livre sixiesme des orgues. p. 394 et 395.

Tu crois ô beau soleil qu’à ton esclat rien n’est pareil, En cet aymable Chanson composée par le Roy [Louis XIII], & mise en tablature par le Sieur de la Barre, Epinette & Organiste du Roy & de la Reyne.

Livre sixiesme des orgues. p. 394.

Fac-similé de l'édition originale (part.1)   (part.2)   (part.3)

Transcription de la partition pour le projet par Damien Desbenoit (part.1)    (part.2)

 

Les diminutions réalisées ici, dont la progression en valeurs rythmiques de plus en plus rapides, est décrite ci-dessus par Marin Mersenne, sont de Damien Desbenoit. Ce dernier s'est donc servit des exemples et incipit donnés par Mersenne (voir fac simile), qu'il a mené de cette manière jusqu'au bout de l'air. Il est à noter que la diminution de la première note de l'air, dans les doubles croches et triplecroches défie les usages et les règles de consonance. Cela dit à cette vitesse, on perçoit très peu la « dissonance ». Ces diminutions sont alors comme des appogiatures.

Dans de nombreuses musiques vocales et instrumentales, l'exécutant ne commence jamais par la « note réelle », mais y arrive par un chemin autre. Ce procédé est commun à de nombreuses musiques traditionnelles, semble avoir été commun pour l'exécution des « organa » médiévaux.

Par ailleurs, autre singularité, Mersenne mentionne le jeu impliquant la division de 64 de la ronde, chose assez rare dans les tablatures de claviers. Et pour cela, Ballard n'a pas le caractère musical pour les imprimer. Ce sont donc des triplecroches qui sont écrites, mais le nombre ne fait pas de doutes. Il faut bien 16 notes par semiminime, ce sont donc nos actuelles quadruplecroches. Voir le texte "La haute virtuosité chez Mersenne" sur ce site. (mise en ligne à venir).

Orgue : Damien Desbenoit.

Instrument joué : l'orgue du Couvent de St Ulrich

L'orgue utilisé est celui du Couvent de St Ulrich : cet orgue ne correspond naturellement pas à ce que Mersenne connut. Néanmoins, en se contentant de n'utiliser que les registres communs aux orgues Européens des années 1600, nous sommes proches d'une configuration habituelle pour jouer ce genre de musique. Il n'était pas question par ailleurs, d'utiliser un orgue coffre, qui, quelle que soit sa qualité, ne pouvait en aucun cas correspondre, même de loin à ce que M. Mersenne appelle un orgue.

L’orgue d’Andahuaylillas du couvent Saint Ulrich à Sarrebourg

L’instrument construit par Jean-François Dupont en 2008 pour l’auditorium du Couvent de Saint Ulrich est exceptionnel à divers titres. En premier lieu, Dupont fut celui qui restaura les deux orgues de la Cathédrale de Cuzco ainsi que les deux de l’église Saint Pierre-Apôtre d’Andahuaylillas. De ce fait il était la personne la plus qualifiée pour réaliser, sinon une copie exacte (il y a toujours une adéquation à un lieu ainsi qu’à une fonction déterminées), du moins un instrument inspiré très directement des témoignages coloniaux de la région de Cuzco. Cet instrument peut être considéré comme l’archétype de l’orgue andin tel qu’il se développa au sud du Pérou et dans l’actuelle Bolivie au cours du XVIIème siècle.

Une autre caractéristique qui rend cet instrument unique, est qu’il s’agit de la première copie d’un instrument américain réalisée par un facteur d’orgue européen. D’habitude, c’est plutôt le contraire qui se produit… Mais au delà, cette réalisation se justifie pleinement par le fait que la Péninsule Ibérique n’a conservée que des vestiges d’instruments du début du XVIIème siècle, alors que la région andine en conserve des douzaines n’ayant subies que peu de modifications. Copier l’un de ces instruments signifie paradoxalement recouvrer cette identité propre à travers de la connaissance de l’orgue flamand – espagnol tel qu’il s’est développé en Amérique, et de cette façon, réabsorber le passé du vieux continent.

Alain Pacquier

 TRAVERSO

Les flûtes d'allemand dans l'Harmonie universelle
William Dongois & Serge Saïta, direction

« C'est le propre instrument des Suisses, et des autres qui battent le Tambour, quoy que les uns le sonnent d'une façon et les autres d'une autre, suivant les differentes coustumes et les differentes tablatures que l'oreille et l'usage peuvent suppleer. Mais l'on ne fait pas ordinairement toutes les parties de Musique avec les Fifres, comme avec les Flustes d'Allemand, que l'on met au ton de chapelle pour faire des concerts: et parce que l'on ne peut faire de Basse assez longue pour descendre assez bas, l'on use de la Sacquebute, ou du Serpent, ou de quelqu'autre Basse pour suppleer, car si la Fluste d'Allemand estoit assez longue pour faire cette partie, les mains ne pourroient pas aysément s'estendre iusques aux derniers trous, tandis qu'on l'emboucheroit; quoy que l'on puisse suppleer ce defaut dans les Basses de ladite Fluste par plusieurs clefs, en les rompant ou redoublant, comme l'on fait aux Bassons, dont nous parlerons apres. »

Livre cinquiesme des instrumens a vent, p. 243.

L'idée de ce travail fut de comparer les propositions du consort de Marin Mersenne avec les usages contemporains, qui eux privilégient un quatuor formé de 3 flûtes appelées souvent aujourd'hui  « ténors » Mersenne ne donnant pas de nom à ces instruments : il parle de la flûte d'allemand, du fifre, plus petit et d'une basse. Le consort proposé par Mersenne oblige à utiliser une flûte en sol, petit instrument qui n'a pas les faveurs des flûtistes d'aujourd'hui. L'« air pour les flûtes d'allemand » fut donc enregistré de cette manière et, transposé à la quarte, pour le quatuor comportant 3 flûtes de type « ténor » pour offrir à l'auditeur d'aujourd'hui la comparaison. Mersenne propose de faire la basse au trombone. Cette expérience fut très concluante. Elle fut faite des deux manières : comme écrite par Mersenne avec une petite flûte en dessus, et a la quarte inférieure avec 3 ou quatre flûtes et avec la sacqueboute comme basse de l'ensemble.

Le diapason utilisé est 440 Hz, qui est celui du Consort de flûtes Renaissance de la HEM. Ces flûtes ne sont pas de type « Mersenne », car nous n'avions pas ce genre d'instrument à notre disposition.

La composition proposée par Mersenne pour faire sonner le concert de flûtes d'Allemand est un air de cour de Guedron (Bergers bergères, issu d'un recueil d'airs de cour paru entre autre en 1620) dont on trouve une diminution dans le « Fluyten Lust Hof » du flûtiste Jakop Van Eyck, sous le nom « La Bergère », superposée ici à la version polyphonique de 1620.

Voir également le travail de Philippe Allain-Dupré sur la question des flûtes « Mersenne » : http://allaindu.perso.neuf.fr/fluterenaissance/Mersenne.htm
 

Air de cour pour les flustes d'Allemand, Henri Le Jeune

Air de Cour pour les flustes d'Allemand. Harmonie universelle, Livre cinquiesme des instruments, p. 244.

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

Air de cour en Do

Air de cour en Sol

Air de cour avec sacqueboute en Do

Air de cour avec sacqueboute en Sol

Les sources musicales des concordances de « l'air de cour » :
Air de Guedron, in « Air de cour de différents auteurs », IV, 1620/1621, F.11-12. « La bergère, Jacop Van Eyck », De Fluyten LUST-HOF, 1644, Amsterdam.

L'allemande du second mode, Anonyme

L’allemande du second mode, Harmonie universelle, Livre second des chants, p. 165.

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

 

Participants aux enregistrements et instruments joués

Enregistrement à Genève, au studio de la HEM de Genève, les 17 et 18 octobre 2014.

Ont participé aux enregistrements :
Carla Claros, flûte ténor et dessus, Constanze Chmiel, flûte ténor, Marie Delorme, flûte ténor, Olivier Riehl, flûte basse et Julien Ribouleau, sacqueboute.

Les instruments joués :
Le Consort de la Hem : flûte cylindriques, en sol, en ré et basse en sol d'après d'après l'original en ré de l'académie de Vérone réalisée par G. Tardino.

 VIOLES

Le consort de violes dans l'Harmonie universelle
Guido Balestracci, direction et viole

« Encore que les Violes soient capables de toutes sortes de Musique, et que les exemples que i'ay donné pour le concert des Violons leur puissent servir, neantmoins elles demandent des pieces plus tristes et plus graves, et dont la mesure soit plus longue et plus tardive; de là vient qu'elles sont plus propres pour accompagner les voix. Or l'on peut ioüer toutes sortes de pieces non seulement à cinq parties, comme l'on fait ordinairement sur les Violons, mais à six, à sept, à douze, et à tout autant de parties que l'on veut; ce qui peut semblablement estre executé par tous les autres instrumens, qui ont assez d'estenduë. Mais il suffit de mettre icy le commencement d'une Composition à six parties, laquelle a deux Dessus, deux Basses, une Taille et une Haute-contre. »

Livre quatriesme des instrumens à cordes, p. 198.

Fantaisie [pour les violes], Anonyme

Fantaisie [pour les violes], Harmonie universelle, Livre quatriesme des instrumens a chordes p. 200.
Pablo Garrido, Henrikke G. Rynning, Amandine Lesne, Oleguer Aymamí, Stéphanie Houillon.

Fac-similé de l'édition originale (Page1)  (Page2)

Transcription de la partition pour le projet, diminutions de Guido Balestracci

 

Fantaisie à quatre, en faveur de la quarte, Antoine du Cousu

Fantaisie à quatre, en faveur de la quarte, Harmonie universelle, livre cinquiesme de la composition de musique p. 300.
Pablo Garrido, Henrikke G. Rynning, Oleguer Aymamí.

Fac-similé de l'édition originale (Pages1-2)   (Pages3-4)

Transcription de la partition pour le projet

 

Pie Jesus Domine, dona eis requiem, Eustache Du Caurroy

Pie Jesu Domine, dona eis requiem (Canon à 6 voix), Harmonie universelle, Livre septiesme des instrumens de percussion, p 162.
Pablo Garrido, Henrikke G. Rynning, Amandine Lesne, Oleguer Aymamí, Stéphanie Houillon.

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

 

L'exécution de ce motet de Du Caurroy présent dans l'harmonie universel évoque l'usage (non mentionné explicitement par Mersenne mais présent dans d'autres sources) de l'usage des violes pour l'exécution du répertoire liturgique.

Sarabande du onzieme mode, Anonyme

Sarabande du onzieme mode. Harmonie universelle, Livre second des chants, p. 166.
Sarabande à 6. Réalisation William Dongois, Transposée.
Pablo Garrido, Henrikke G. Rynning, Amandine Lesne, Oleguer Aymamí, Stéphanie Houillon.

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

 

Participants aux enregistrements et instruments joués

Ont participé aux enregistrements :

Pablo Garrido, Henrikke G. Rynning, Amandine Lesne, Oleguer Aymamí, Stéphanie Houillon.

Les instruments joués:

Le consort de violes a été monté exclusivement avec des cordes en boyaux, jusqu'aux cordes les plus graves et accordées en 392 Hz.

Dessus de viole de Eduardo Gorr, Crémone 2002 inspiré de l'école allemande du XVIIième siècle.
Dessus de viole de Pierre Bohr, Milan 2009 d'après un modèle anonyme italien autour de 1640 (collection privée).
Alto de viole de Pierre Bohr, Milan 2006 d'après un modèle anonyme italien autour de 1640 (collection privée).
Ténor de viole de Pierre Bohr, Milan 2006 d'après un modèle anonyme italien autour de 1640 (collection privée).
Basse de viole de Pierre Bohr, Milan 2009 d'après un modèle anonyme italien autour de 1640 (collection privée).
Basse de viole de Sergio Marcello Gregorat, Rome 2011 inspiré de Maggini et Zenatto.

Les archets sont de Fausto Cangelosi inspirés des modèles italiens de la Renaissance et du XVIIième siècle.

VIOLONS

La musique de violons dans l'Harmonie universelle
William Dongois, direction

Il est difficile de condenser tout ce que Mersenne dit du « Roi des instruments » à qui il prête de nombreuses qualités : la puissance de sa sonorité, la subtilité et la suavité de son jeu, particulièrement lors de l'exécution de passages et d'ornements, sa capacité à transposer dans tous les tons, etc.

« Le Violon est l'un des plus simples instrumens qui se puissent imaginer, dautant qu'il n'a que quatre chordes, et qu'il n'a point de touches sur son manche, c'est pourquoy l'on peut faire dessus toutes les Consonances iustes, comme avec les voix, dautant que l'on le touche où l'on veut: ce qui le rend plus parfait que les instrumens à touche, dans lesquels on est contraint d'user du temperament, et d'affoiblir ou d'augmenter la plus grande partie des Consonances, et d'alterer tous les intervalles de Musique, comme ie monstreray apres. A quoy l'on peut adiouster que ses sons ont plus d'effet sur l'esprit des auditeurs que ceux du Luth ou des autres instrumens à chorde, parce qu'ils sont plus vigoureux et percent davantage, à raison de la grande tension de leurs chordes et de leurs sons aigus. Et ceux qui ont entendu les 24. Violons du Roy, advoüent qu'ils n'ont iamais rien ouy de plus ravissant ou de plus puissant: de là vient que cet instrument est le plus propre de tous pour faire danser, comme l'on experimente dans les balets, et par tout ailleurs. Or les beautez et les gentillesses que l'on pratique dessus sont en si grand nombre, que l'on le peut preferer à tous les autres instrumens, car les coups de son archet sont par fois si ravissans, que l'on n'a point de plus grand mescontentement que d'en entendre la fin, particulierement lors qu'ils sont meslez des tremblemens et des flattemens de la main gauche, qui contraignent les Auditeurs de confesser que le Violon est le Roy des instrumens ».

Livre quatriesme des instrumens, p. 177.

Marin Mersenne livre pour les violons d'une part une fantaisie d’Henry Le Jeune, violoniste, dont seule la partie de dessus est dotée de diminutions, à titre d'exemple. Marin Mersenne suggère comme nombre d'auteurs en Italie au 16ième siècle (Dalla Casa, Maffei, Luigi Zenobi, voir ces exemples et descriptions dans l'ouvrage Semplice où passegiato, produit par la HEM chez DROZ, 2014 et les différents documents concernant la diminution sur ces pages consacrées à la musique de l’harmonie universelle) que, si le dessus est le lieu privilégié de la diminution, les autres parties doivent être également « habillées » d'ornements et diminutions. Forts de ces conseils, nous avons écrit des diminutions dans les autres parties de la fantaisie, inspirées  des exemples et figures donnés par Marin Mersenne lui-même. Marin Mersenne semble proposer la diminution de dessus, virtuose, comme allant de soi, d'où l'hypothèse cette manière de faire pourrait constituer une norme de l'exécution de ce genre de musique polyphonique instrumentale.

Il est en général convenu que le style « sévère » des fantaisies n'est pas à proprement parler le lieu pour développer ce que nous appelons de la virtuosité. Mersenne remet ce préjugé en cause. Il se peut que de simples ornements rapides soient simplement la « nature » du jeu instrumental du violon, mais aussi des autres instruments et de la voix. De fait, il faut peu de travail et d'assiduité à un bons musiciens pour exécuter de telles diminutions sommes toutes assez simples.
 

Fantaisie pour les violons, Henry Le Jeune

Fantaisie [pour les violons], Harmonie universelle, livre quatriesme des instrumens a chordes, p. 186. Ornementation des parties non diminuées de de l’Harmonie universelle : William Dongois.
Sue-ying Koang dessus de violon, Vanessa Monteventi, quinte de violon, Emilie Mory Haute-contre de violon, Pablo Garrido taille de violon, Henrikke G. Rynning, basse de violon.

Fac-similé de l'édition originale (part.1)   (part.2)

La diminution du dessus
La fantaisie sans diminution, transcription William Dongois
Transcription de la partition pour le projet : la Fantaisie avec diminution

 

Pavanne du quatriesme mode, Anonyme

Pavanne du quatriesme mode. Harmonie universelle, Livre second des chants, p 166.
Parties intermédiaires reconstituées à partir de Michael Praetorius/Caroubel, Terpsichore, 1612.
Sue-ying Koang dessus de violon, Vanessa Monteventi, quinte de violon, Emilie Mory Haute-contre de violon, Henrikke G. Rynning, taille de violon, Pablo Garrido, basse sib.

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

 

La Moresque du dixiesme mode transposé, Anonyme

La Moresque du dixiesme mode transposé, Harmonie universelle, Livre second des chants, p. 166.
Partition établie d'après la concordance avec la pavane d'Espagne de Praetorius/Caroubel, Terpsichore, 1612.

Fac-similé de l'édition originale

Transcription de la partition pour le projet

 

Instruments joués: Sue-Ying, violon, Vanessa, violon, Émilie, violon alto Pablo : violoncelle piccolo, Henrrike, basse en Do.
Sue-ying Koang dessus de violon, Vanessa Monteventi, quinte de violon, Emilie Mory Haute-contre de violon, Pablo Garrido, taille de violon,Henrikke G. Rynning, basse de violon.

Participants aux enregistrements et instruments joués

Ont participé aux enregistrements :

Sue-ying Koang, dessus de violon, Vanessa Monteventi, quinte de violon, Emilie Mory Haute-contre de violon, Henrikke G. Rynning, taille de violon (violoncelle piccolo) et basse sib, Pablo Garrido,Taille de violon (violoncelle piccolo) et basse sib.

Les instruments joués :

Violons : violon de Zhang Zhi Ming de 2011, modifié par Luc Breton en 2014
Violon d'Apostol Kaloferov,1985
Violon alto de Halász László, Budapest, 2001
Violoncelle piccolo (HEM) de Robert Louis Baille.
Basse de violon, anonyme école italienne monté en basse de violon (sib/fa/do/sol).
Diapason : 392 Hz

VOIX

La musique vocale dans l'Harmonie universelle
Julie Hassler, direction et voix

« Il ne suffit pas d'avoir traité des mouvemens, des sons, des consonances, des dissonances, des systesmes, des genres, des modes, de la composition, de la voix, et des chants, si l'on ne sçait la maniere et la methode de bien chanter toute sorte de Musique, c'est pourquoy i'ajoûte ce livre…Or ce livre est le principal, et le plus difficile de tous, parce que ses preceptes ne peuvent estre reduis en pratique sans une bonne voix, laquelle on doit supposer: mais parce quelle ne suffit pas toute seule, si elle n'apprend à se conduire par toutes sortes de mouvemens, de degrez, et d'intervales, i'explique dans ce livre comme elle doit se porter dans les plaintes, dans les diminutions, et aux accents, et comme elle doit executer tout ce qui peut tomber sous l'imagination ».

Livre sixiesme de l'art de bien chanter, p. 331.

« Or pour chanter avec moins d'imperfection, il semble qu'il ne suffise pas de prononcer aussi franchement comme si l'on recitoit avec les accens convenables aux sens de la lettre que la voix soit belle, pleine, douce et moëlleuse portée et conduite d'une belle maniere; mais encore qu'elle tienne d'une grande intention, et soit animée d'un beau mouvement; mais il semble que la mode presente ne soit qu'à la delicatesse et à la mignardise. Encore qu'il soit aysé de conclure qu'elles doivent estre les qualitez d'une bonne voix de ce que nous avons dit dans le livre de la voix, il faut neantmoins les expliquer icy plus distinctement, afin que ceux qui enseignent à chanter ne perdent pas leur temps apres les mauvaises voix. Or il y a 4 sortes de voix, à sçavoir celle de la Basse, de la Taille, de la Hautecontre, et du Dessus, Quant à leurs qualitez, elles doivent estre iustes, égales, et flexibles; dont la iustesse consiste à prendre le ton proposé, sans qu'il soit permis d'aller plus haut, ou plus bas que la chorde, ou la note qu'il faut toucher, et entonner. »

Livre sixiesme de l'art de bien chanter, p. 341/342.

« L'égalité est la tenuë ferme, et stable de la voix sur une mesme chorde, sans qu'il soit permis de la varier en la haussant ou en la baissant, mais on peut l'affoiblir, et l'augmenter tandis que l'on demeure sur une mesme chorde. Et la flexibilité de la voix n'est autre chose que la facilité et la disposition qu'elle a à se porter par toutes sortes de degrez et d'intervalles tant en montant, qu'en descendant, et en faisant toutes sortes de Passages, et de diminutions: ce que l'on doit particulierement observer à la voix du Dessus, dont depend le principal ornement de la Musique, comme i'ay monstré ailleurs, d'autant qu'elle fait ordinairement les diminutions, qu'elle fait paroistre la beauté du sujet, et de la lettre qu'elle recite: de là vient que plusieurs ayment mieux entendre le recit d'un bon Dessus, qu'un concert entier, dont i'ay expliqué les raisons dans un autre lieu. »

Livre sixiesme de l'art de bien chanter, p. 354.

La question de l’esthétique des voix historiques reste épineuse en l'absence de voix conservées dans les musées, contrairement aux instruments, même si l'instrument reproduit, qui n’est jamais un copie exacte de l’original, est loin de représenter une certitude quant à son usage et au résultat. La voix reste la référence essentielle en matière de musique. Mersenne lui consacre plusieurs livres et évoque longuement sa physiologie. Il ne tarit pas sur la question de l'ornementation. Dans le travail sur la musique vocale de l’Harmonie universelle nous avons essayé d'être pragmatiques en intégrant ce qu'il était possible de ce que nous livre Marin Mersenne. Nous avons adopté la prononciation gallicane du latin et fait différents essais de diapason. Le diapason idéal d'une musique est complexe et dépend des outils à disposition : le larynx des uns et des autres, les habitudes des chanteurs et le type de placement de la voix car l'esthétique vocale est inscrite dans le corps même du chanteur. Ce sont des conditions à respecter pour une restitution confortable (garante d’une certaine qualité), tant pour le chanteur que l'auditeur et à mettre en balance avec les données de la recherche.

Les différentes versions des diminutions qui se trouvent dans l'Harmonie Universelle auraient été livrées à Mersenne (directement ou indirectement) par les chanteurs/compositeurs Antoine de Boesset, Henri Le Bailly et Estienne Moulinier. Indépendamment de la difficulté de mettre les diminutions en notation moderne (notamment d'accorder une place aux ports de voix que Mersenne note), rentrant dans le cadre de la mesure, les versions présentées dans l'Harmonie Universelle comportent manifestement des fautes. Le document ici présent rend compte du choix d'édition pratique adopté. Les documents sonores, eux, tentent de se rapprocher d'un geste musical moins arithmétique.

Par ailleurs, la question du diapason de confort et du jugement à apporter quant au résultat, fut discutée et expérimentée sans pouvoir être tranchée. C’est pourquoi l’air de cour l'une N'esperez plus mes yeux est présenté ici avec deux versions : l’une à 440 Hz l'autre à 392 Hz. L’auditeur peut avoir ainsi une idée de l’impact de la hauteur générale sur une composition telle que cet air de cour.

Enregistrements réalisés à SARREBOURG, au Couvent Saint Ulrich.

Divine Amarillis, Antoine Boesset

Divine Amarillis, ton teint brun comme il est fait honte à tous les lys, (Harmonie universelle, Livre premier des instrumens a chordes, p. 90.

Fac-similé de l'édition originale

 

Enregistrement effectué à Genève (17/18 octobre)
Luth et voix : Daniel Morais, luth, Marie-Najma Thomas, soprano.

N'espérez plus mes yeux, Etienne Moulinie et Antoine Boesset

Nʼesperez plus mes yeux, port de voix et couplet en diminution de Etienne Moulinie et Antoine Boesset, Harmonie universelle, Livre sixiesme de lʼart de bien chanter p. 412/413/414.         

Nʼesperez plus mes yeux (2 versions des deux diminutions pour voix et clavecin).
- Diminution de Monsieur Le Bailly (1ière fois)
- Autre diminution de Boesset (à la reprise)
(Julie Hassler, soprano ; Damien Desbenoit, clavecin)

Enregistrement de "N'espérez plus mes yeux" à 392Hz

Enregistrement de "N'espérez plus mes yeux" à 440Hz

Version en ensemble du même air de cour :

Clavecin (Damien) , Soli de Marie-Najma Thomas (soprano) et de Romain Bockler.                                

1ière fois : Soprano et baryton
- chant simple et version « port de voix » (HU) à la reprise sur les partie A et B de l’air.

2ième fois
Partie A :
Baryton solo, second couplet en diminution (HU).
Soprano solo, second couple en diminution à la reprise (HU).

Partie B
Soprano solo, second couple en diminution (HU).
Baryton solo, second couple en diminution (HU).

3ième fois
Tutti

Le diapason à 440 Hz, est un choix de confort des chanteurs

Enregistrement de "N'espérez plus mes yeux", soli et ensemble vocal

Fac-similé de l'édition originale (page1)   (page2)   (page3)

Transcription de la partition pour le projet de l'ensemble des diminutions de l'air de cour dans l'Harmonie universelle
Transcription de la partition pour le projet de l'air de cour en version polyphonique

Tu crois ô beau soleil, Louix XIII [Pierre III] La Barre

Tu crois ô beau soleil, version polyphonique d’après la tablature d’orgue.

Partition pratiue de l'air de cour Tu crois au beau Soleil en version polyphonique établie pour le projet

 

Requiem æternam, Jacques Mauduit

Requiem æternam, Harmonie universelle, Livre septiesme des instrumens de percussion, p. 66.

Fac-similé de l'édition originale (page1)   (page2)   (page3)   (page4)

Partition pratique établie pour le projet

 

Pie Jesus Domine, dona eis requiem, canon à six voix, Eustache Du Caurroy

L’ensemble vocal a enregistré le canon à six voix d’Eustache Du Caurroy Pie Jesu Domine, dona eis requiem avec les cornets et sacqueboutes et serpent.

 

Participants aux enregistrements et instuments joués

Ensemble vocal : Marie-Najma Thomas (soprano), Jérôme Vavasseur (alto), Augustin Laudet (ténor)
Participant hors HEM : Romain Bockler (baryton)
Clavecin : Damien Desbenoit
Soprano et direction Julie Hassler.

La diminution dans l’harmonie universelle

Le projet de la HEM et du CMBV visant à interroger l’Harmonie Universelle de Marin Mersenne a mis en avant le fait que Marin Mersenne est avant tout un compilateur. Il rassemble des données et tente de les intégrer à une vision apologétique : image de l’union des sciences et d’une (nouvelle) vision chrétienne du monde. Mathématicien, théologien, ami de Descartes, Marin Mersenne n’est pas musicien. Souvent il ne donne même pas l’impression d’adhérer aux indications qu’il nous livre. Aussi trouve-t-on dans l’Harmonie universelle ça et là des contradictions. Ainsi ne saurons-nous jamais ce que sont ses goûts musicaux. Il donne rarement son avis. Il apprécie le style ancien notamment celui d’Eustache Du Caurroy. Il se plaint également que les luthistes ne jouent pas assez pour la gloire de Dieu. Pour le reste, son apparente neutralité nous permet alors de traiter ce qu’il nous rapporte, comme une sorte de matière première. Nous devons alors intégrer ces données à un point de vue général sur les pratiques de cette époque. Praticien, questionnant l’Harmonie Universelle et les données transmises par Marin Mersenne, j’ai été surpris par l’importance accordée à la question des ornements et au geste instrumental et vocal. Ces allusions fréquentes à la pratique de l’exécutant qui parsèment l’ouvrage m’ont incité à proposer une compilation en la mettant en perspective avec les autres sources traitant de ce sujet. Je me suis donc engagé à essayer de faire parler cette somme d’informations en offrant au lecteur un large panorama de ce que Mersenne nous livre dans l’Harmonie Universelle, panorama que le lecteur devra intégrer, non seulement à sa vision de la musique des années 1630 en France, mais aussi à sa vision des musiques anciennes tant la question de l’ornementation et de la diminution se pose pour tout répertoire ancien dont nous ne disposons pas d’enregistrement : dès l’instant où la musique est écrite se pose la question de savoir quel monde sonore et musical ressort du rapport son/notation impliqué par la notation de la musique occidentale. Quel son se cache derrière le signe ? Depuis des années, l'héritage de mes professeurs et la confrontation à la pratique m'ont amené à penser que nous n'accordions pas à la diminution et l'ornementation leur juste place, particulièrement en ce qui concerne la musique avant 1650. Et qu'il en résultait une image de la musique historique probablement fausse.

Le survol de l'Harmonie Universelle me conforte dans cette idée. Le lecteur pourra recontextualiser les citations sises dans les textes présentés ici (liste non exhaustive, loin s’en faut !) issues des quelques 1500 pages de l'ouvrage et, de cette autre lecture, relativiser mon point de vue. Mais il était important de mettre en valeur ces informations sur les pratiques musicales transmises par Marin Mersenne tout en les confrontant à ce que nous savons déjà. Quand Mersenne parle de musique il mentionne des « chants », des « sons ». Ces mots, surtout le premier, recouvrent chez lui un champ sémantique assez large. Aujourd'hui, nous pensons plus volontiers en termes de « notes ». Il ne faut pas oublier que « note » vient de « noter » et « notation », que cela nous renvoie à une représentation graphique du son. Rapportée au son, la note n’existe pas : le geste musical produit des « notes » dotées d’un mouvement, d’un mode d’attaque, de tenue, de lâcher et le cas échéant, d’un ou plusieurs ornements rarement notés à cette époque. Dans d'autres traditions, quand existe un système de notation musicale, celui-ci indique souvent d’avantage le mouvement sonore que les hauteurs et les rythmes. C'était le cas en Occident pour les premières notations de plain-chant en neumes. Pour finir je voudrais inviter le lecteur à penser qu’un son est une note habillée et, en ce qui concerne la phrase musicale, lui rappeler le mot de Silvestro Ganassi : « La diminution est l'ornement du contrepoint » (La Fontegara, chap. 13, Venise, 1535). 

Introduction à l’harmonie universelle et la diminution (pdf)

De l’importance de la diminution (pdf)

À qui est destinée la diminution (pdf)

Le geste ornemental selon Mersenne (pdf)

La diminution vocale (pdf)

La diminution et les instruments (pdf)

La haute virtuosité chez Mersenne (pdf)

Le vocabulaire de diminution transmis par Marin Mersenne (pdf)

Conclusion, index des noms, ouvrages cites, bibliographie (pdf)