MONIKA E. KAZI Room with a View
© Conradin Frei
MONIKA E. KAZI Room with a View
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MONIKA E. KAZI Room with a View
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MONIKA E. KAZI Room with a View
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MONIKA E. KAZI Room with a View
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MONIKA E. KAZI Room with a View
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Monika E. Kazi: Prix HEAD Galerie 2021 à la galerie PHILIPPZOLLINGER

Février 2022 - Avril 2022

MONIKA E. KAZI
Room with a View
25 février – 2 avril 2022
Room with a View est la première exposition en solo de Monika E. Kazi à Zurich.
http://philippzollinger.com/exhibition/room-with-a-view

Pour dresser la liste du contenu de l’exposition dans les termes les plus basiques, on citera des cadres de fenêtres, des cartes postales, des anneaux métalliques avec des chaînes, de l’eau évaporée, des miroirs et de la lumière. Ceux-ci sont indéniablement présents dans l’espace avec le spectateur. Sans oublier des mises en scène complexes touchant à l’histoire personnelle et politique, la rupture des dimensions, l’exploration de l’artisanat et de son commerce. Au niveau supérieur – qui est à la fois macro et micro – il se peut que l’on expérimente la sensation intense d’être retenu.

Le travail de Kazi est immédiatement identifiable. Non pas par les processus de production, les motifs ou les matériaux (qui se développent de manière exponentielle), mais par une façon reconnaissable viscéralement de considérer les choses avec soin et précision. Cela a été le cas dans des œuvres précédentes où elle s’est servie de l’eau en tant que matériau, que ce soit sous forme de larmes, de l’eau du bain ou d’un contexte géographique. La manière dont l’eau requiert des limites pour être saisie par l’être humain a été scrutée : comment encadrer cet élément, bien plus complexe que nous, le réduisant à des termes banals.

L’eau en tant que substance n’est plus, mais la pratique de Kazi continue de retenir les idées et leurs matériaux implicites comme de petits barrages ou réservoirs, toute erreur dans cette barrière risquant le débordement et la perte complète de l’œuvre, tout comme l’eau s’échappe dans le sol.

L’œuvre centrale de la première salle est un grand cadre de fenêtre trônant au centre, dont les volets représentent un feuillage tropical. Tourner autour du décor, celui-là même qui s’aplanit au regard en une forme physique, permet à l’œuvre d’acquérir sa propre flexibilité. En théorie, elle peut être manipulée, se refermer sur elle-même et encadrer de manière traditionnelle la silhouette du feuillage, ou non – rompant avec l’aspect bidimensionnel, la fenêtre est capable de tenir toute seule. La vision se mue en une coupe rigide dans la pièce, perturbant tout sentiment de hiérarchie dimensionnelle. Dans la deuxième salle, on découvre une fenêtre plus petite contre un mur. En observant cette œuvre à hauteur du regard, nous voyons la prédominance de la croix et son rôle de premier plan de symbole de la foi chrétienne, comme si elle défilait à travers le monde, et le drapeau suisse lui-même, à la fois si fixe et si insaisissable.

Qu’est-ce qu’une fenêtre ? Kazi décrit la fenêtre comme ce qui vient avant la porte dans les espaces domestiques les plus rudimentaires. Une fenêtre est une ouverture dans un mur extérieur, qui crée un échange avec le monde du dehors. Une fenêtre est un instrument permettant le mouvement visuel et mental avant le mouvement physique. Elle est à la fois cadre et obstacle, et y prend un grand plaisir. La fenêtre domestique n’est pas un espace pour la foule, elle est destinée à un spectateur unique en dialogue avec lui-même.

Le bois sélectionné pour les différentes pièces des fenêtres vient du Congo, la patrie de la famille de Kazi. Une ambiguïté dans ce choix : l’attirance pour le matériau s’inscrit-elle en l’artiste pour sa familiarité ou s’agit-il simplement d’une heureuse coïncidence de rencontre et de partage d’origines communes ?


Les anneaux en métal avec des chaînes sont un signe de considération envers les petites répliques de la Tour Eiffel en métal moulé, fabriquées par des ouvriers mal payés dans un pays lointain, dont le nom n’est pas divulgué, et vendues aux touristes par des immigrés. Aucune étape de l’échange n’est enracinée à Paris. Ces anneaux vides peuvent représenter une journée de ventes et d’échanges fructueux, mais aussi l’épuisement physique et matériel. Leur vide ouvre une porte de réflexion sur les sites du commerce antique : l’histoire du Congo en tant que partenaire commercial de la France avant l’esclavagisme, au XVe siècle, liant les deux pays dans une relation diplomatique particulière : une conversation en tête-à-tête qui a vu l’exportation de formes spécifiques d’artisanat et de matériaux. Cette complexité fait l’objet d’une étude intense entreprise par l’artiste, se situant au-delà des lieux communs et étant simplement caractérisée par ce qui manque.

Le titre de l’exposition Room with View peut être interprété comme la façon dont nous optons pour le pittoresque lors d’une réservation d’hôtel – et renvoyons une carte postale en guise d’aide-mémoire. Dans sa conversation, Kazi utilise souvent le terme « maison », mais son lieu reste flexible : la France, le Congo, son domicile actuel en Suisse. La maison fait souvent référence à l’endroit où elle n’est pas.

Je sens que les corps sont absents de cette exposition, et pourtant il y a trois portraits argentés dans les miroirs en forme de nuages. Ils sont tirés d’une photographie que l’artiste a prise de ses parents à l’âge de 11 ou 12 ans. La photo date d’une époque et d’un lieu similaires à ceux de l’image figurant sur les cartes postales empilées à proximité. De nombreuses œuvres de Kazi me bouleversent, je me sens ébranlée lorsque ses parents apparaissent dans le miroir, ce que j’observe m’attire vers le vide et m’entraîne dans une chronologie, dont je ne peux me détacher. Les faits établis ont besoin d’être reconnus pour permettre le mouvement mental, lorsque nous devons appréhender les objets qui nous sont partagés dans cet espace. Je me décompose, tout comme l’eau qui s’est évaporée en laissant une trace spectaculaire d’elle-même. Mon comportement en tant que spectatrice est assimilé à un matériau et étiré jusqu’à ses limites. Le travail de Kazi est puissant en ses termes, elle nous encadre, nous observe, nous chorégraphie à travers son regard enflammé. Room with a View sous-entend le spectacle mais, avec délicatesse, elle propose l’intimité de l’échange par le biais de la fenêtre, du souvenir, de la carte postale. Dans son ensemble, Room with a View génère la charge hydro-électrique du contact visuel, plutôt que le spectacle de masse : l’exposition est une interaction habilement cadrée proposant un dialogue, plutôt qu’un diktat, dont Kazi nous gratifie par le biais de l’artisanat, du langage et d’une générosité ciblée. – Anthea Hamilton

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Monika E. Kazi est née en 1991 à Paris et a grandi à Pointe-Noire (République du Congo) et à Paris (France). Elle vit et travaille actuellement à Genève. Après la décoration intérieure, elle a étudié les Arts Visuels auprès de la HEAD Genève où elle a obtenu un master avec mention en 2021. Kazi séjourne à La Cité internationale des arts à Paris de mars à août en tant qu’artiste en résidence. Ses récentes expositions en solo et en duo incluent Fri Art Kunsthalle Fribourg (À VENIR) ; WallStreet (Fribourg, 2021) ; sic! Elephanthouse (Lucerne, 2021) et HIT (Genève, 2019). Elle a participé à un grand nombre d’expositions groupées telles que Futura (Prague, 2021) ; Limbo Space (Genève, 2020) et Le Kabinet (Bruxelles, 2018). En 2021, Kazi a été lauréate du Prix Kiefer Hablitzel.

LISTE DES ŒUVRES

Salle 1, dans le sens des aiguilles d’une montre
Lune en Cancer, 2022, cartes postales A6, texte, support de carte, 15 × 10,5 cm
If you want to see the one?, 2022, verre, nitrate d’argent, verre laqué acrylique, métal, 53,5 × 48 cm
key chain brass + key chain bronze, 2022, métal, cuivre, bronze, 25 cm diamètre
homeview 1, 2022, bois d’acajou du Congo, chaînes en cuivre, 100 × 180 × 8 cm
If you want to see the one?, 2022, verre, nitrate d’argent, verre laqué acrylique, métal, 53,5 × 

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