Notre approche de l’architecture est dominée par le primat de la perception visuelle. Or, notre expérience de l’architecture se constitue à partir d’un point central irréductible à l’œil. Ce point n’est autre que le corps, considéré dans toutes ses facultés perceptives et réflexives. A travers une philosophie pragmatique toujours située et incarnée, Richard Shusterman propose de repenser la théorie et la pratique architecturale à partir de sa conception du soma comme corps vivant et sentant. La soma-esthétique implique en effet d’améliorer notre aptitude à discriminer les éléments de toute création architecturale, notamment dans ses dimensions kinesthésiques et proprioceptives. Différentes questions s’éclairent alors, comme celle posée par la notion d’ « atmosphère » en architecture. Dépassant l’opposition historique entre autonomie formelle moderniste et posture acritique postmoderne, de telles formes esthétiques et sociopolitiques vécues et réfléchies à la lumière de l’expérience somatique invitent à ouvrir un nouveau chantier critique.