L’abondance d’énergie permise par le charbon et le pétrole depuis plus d’un siècle nous a progressivement fait perdre la compréhension de la dépendance naturelle des produits humains, ainsi que leur esthétique et leur design, à l’égard des conditions matérielles, non humaines, qui participent en vérité autant que le génie humain à la réussite de la création artistique.

À quoi aurait ressemblé l’esthétique des années 1960 sans le pétrole, qui a rendu possible le plastique et toutes les formes moulées typiques de ces années-là ? À quoi ressemblerait l’esthétique du nouveau millénaire sans les logiciels 3D ? Que serait l’esthétique moderne sans le charbon qui a rendu possible le chauffage central et la climatisation ? À quoi aurait ressemblé l’architecture romaine si Vitruve avait travaillé sur AutoCAD ? Quelle forme auraient les bâtiments de Le Corbusier s’il avait travaillé en 3D sur Rhino ? À quoi ressembleraient les cathédrales gothiques si la gravité universelle n’existait pas ? À quoi ressembleraient les chalets suisses s’il n’y avait pas eu de neige ?

Notre atelier de design d’intérieur questionne la dépendance du design aux conditions matérielles non humaines de représentation et de construction, en tenant compte du fait que non seulement les crayons, les gommes, l’encre, les logiciels 2D et 3D, mais aussi le bois, la terre, la pierre, la pluie, le vent et la gravité peuvent tous être considérés comme des co-auteurs du projet humain.