Henri Michaux s’est adonné régulièrement aux expérimentations des psychotropes entre 1955 et 1960, ce qui a donné lieu à plusieurs ouvrages et de nombreuses œuvres plastiques. Si pour les médecins, ces expérimentations sont faites afin d’établir un tableau clinique des symptômes et trouver des formules de guérison, pour Michaux, il s’agit de développer une pratique de l’écoute du corps ou de la cénesthésie. Auto-observation intime et impersonnelle, l’écoute du corps explore la région incommensurable du dedans où se forme l’impulsion des mots et des images. Nous présenterons le projet de recherche FNS en cours sur ces questions (Par la voie des nerfs. Poétique et esthétique de la cénesthésie) et les archives scientifiques, poétiques et plastiques qu’il mobilise. Nous formulerons aussi l’hypothèse que l’œuvre de Michaux, par-delà une poétique de la guérison, témoigne de l’émergence, au XXe siècle, d’une épistémologie de type cénesthésique.
Muriel Pic est critique littéraire, traductrice de l'allemand, collagiste et écrivain. Elle a publié plusieurs essais, notamment sur Pierre Jean Jouve (Le Désir monstre, 2006), W. G. Sebald (L’Image Papillon, 2009), Henri Michaux (Mescaline 55, 2014), et a traduit Walter Benjamin (Lettres sur la littérature, 2014). Ses recherches critique et poétique sont toujours fondées sur des archives et elles ont aussi donné lieu à des ouvrages de proses et de poèmes : Les désordres de la bibliothèque en 2010, Élégies documentaires en 2016 et En regardant le sang des bêtes en 2017. Docteur de l’EHESS, elle a enseigné à l’université de Neuchâtel et est actuellement professeur boursier FNS de littérature française et comparée (XXe siècle) à l’université de Berne.
Actualité de la Recherche: Semestre de printemps