Deux chercheurs viennent de mettre en évidence une découverte permettant de contrôler le mildiou de la vigne grâce à des fumigations d'huile essentielle d’origan. Ces résultats prometteurs sont une excellente nouvelle pour la protection biologique de la vigne.
Le professeur Markus Rienth de la Haute école de viticulture et œnologie de Changins et le professeur François Lefort de la Haute école du paysage, d’ingénierie et d’architecture de Genève, (HEPIA), coauteurs de la recherche, viennent de publier les résultats de cette étude dans un article scientifique du journal PLoS One, paru vendredi 27 septembre 2019.
Les pesticides synthétiques appliqués en viticulture représentent une quantité relativement élevée par rapport aux autres cultures, en raison de la grande sensibilité de la vigne (Vitis vinifera L.) aux champignons pathogènes. Il devient absolument nécessaire de réduire les fongicides afin de promouvoir des écosystèmes viticoles durables et de répondre aux demandes des consommateurs.
Les huiles essentielles végétales comptent parmi les produits phytopharmaceutiques naturels les plus puissants. Elles ont déjà démontré leurs propriétés antifongiques contre différentes maladies des plantes. Leurs performances dépendent toutefois du moment et de la méthode d'application. Par ailleurs, les mécanismes moléculaires, à l’origine de leur efficacité sont loin d'être compris.
Cette étude de l’école de Changins et d’HEPIA visait à contourner les inconvénients de l’application directe d’huile essentielle. Elle cherchait à déterminer, d’une part si une fumigation continue pouvait contrôler le mildiou, et d’autre part, à décrypter les mécanismes moléculaires impliqués dans l’efficacité des huiles essentielles contre les agents pathogènes.
Les expériences ont été conduites sur le cépage Chasselas, particulièrement sensible au mildiou (Plasmopora viticola). Des boutures ont été infectées par le parasite et exposées à une fumigation continue de différentes huiles essentielles. De façon surprenante, et pour la première fois, les chercheurs ont pu montrer que le traitement à la vapeur d’huile essentielle d’origan au cours des premières 24 heures suivant l’infection est capable de réduire le développement du mildiou de 95%.
L’analyse par séquençage des ARNm (acides ribonucléiques messagers, utilisés comme intermédiaire par les cellules pour la synthèse des protéines) de ces vignes traitées avec des huiles essentielles a montré sans ambiguïté que le traitement a déclenché de nombreux mécanismes de résistance de la vigne qui sont très probablement à l’origine de l’efficacité du traitement. Pour la première fois une étude transcriptomique (étude qui permet d’étudier tous les gènes actifs à un moment donné) montre l’effet d’une huile essentielle sur l’expression de dizaines de gènes du système immunitaire de la vigne.
Ces résultats revêtent une importance majeure pour la production et la recherche sur les biopesticides, les produits de stimulation des plantes, ainsi que pour les stratégies de sélection par résistance. Ils doivent encore être approfondis avant d’envisager une application à grande échelle, mais ils représentent une avancée significative pour l’avenir de l’agriculture biologique et plus globalement du développement durable.