La réflexivité dans l'activité des travailleurs sociaux: enjeux pour la professionnalisation

Sylvie Catherine Mezzena (HETS), Kim Stroumza Boesch , Laurence Seferdjeli (conseillère scientifique, HEdS-GE, Genève), Pascal Baumgartner (assistant de recherche, HETS - Genève)

Notre recherche porte sur un terrain de l’éducation spécialisée, une structure d’hébergement qui se voit enjoindre par le politique la mise en place d’une nouvelle mission d’insertion. Depuis une approche située de l’activité et dans les pas de la sociologie française de l’action de Quéré et Ogien, nos analyses mettent en évidence que la réflexivité des professionnels, définie par le modèle du praticien réflexif de Schön et de ses dérivés comme un travail de mise à distance, d’analyse et de formalisation de leur pratique par les professionnels, n’est pas suffisante pour rendre compte de la construction de l’intervention. Qu’il s’agisse de réunions d’équipe visant la formalisation de nouvelles prescriptions, de colloques hebdomadaires visant la résolution des problèmes pratiques nouvellement survenus, d’échanges informels entre les professionnels en cours d’action, ou encore d’entretiens pré- ou post-activité ou lors d’autoconfrontations réalisés avec les professionnels dans le cadre de la recherche, l’activité échappe sans cesse à une formalisation de par les propriétés de l’action. Depuis la philosophie pragmatiste deweyenne, nos analyses des enquêtes pratiques des professionnels, à la fois immanentes et filées dans le temps, montrent que la construction de l’intervention exige un savoir-faire logé dans l’activité même. Sur la question du noviciat, l’analyse de l’activité d’une nouvelle entrante dans le métier montre que l’expérience acquise lui a permis de passer d'une logique prescriptive et applicationniste à une logique expérimentale et pragmatiste, faisant de l’ajustement aux conditions réelles des situations et de la prise en compte des effets des expérimentations le cœur de la construction de l’intervention.