Le Centre interprofessionnel de simulation s’agrandit

Publié le 17 mai 2017

Initié en 2013 par la Faculté de médecine de l’UNIGE et la Haute école de santé de Genève (HEdS), le Centre interprofessionnel de simulation (CiS) compte aujourd’hui deux autres partenaires essentiels du domaine de la santé: les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) et l’Institution genevoise de maintien à domicile (imad). À la fois high-tech, avec ses mannequins de simulation perfectionnés, et profondément humain grâce aux patients simulés et à son personnel, le CiS offre aujourd’hui un éventail complet de formations dans le domaine de la santé. Par cette approche globale de santé publique, les institutions partenaires montrent clairement leur volonté de former en commun les divers professionnels de la santé pour favoriser la cohérence et la continuité de la prise en charge des patients.

2017 commence fort pour le CiS: le centre dispose maintenant d’un total de 1’200 m2 de locaux sur mesure situés au 5 e étage du nouveau CMU et à l’espace de la Roseraie, et voit arriver deux partenaires supplé- mentaires. En effet, les HUG rejoignent cette année la plateforme, et imad sautera à son tour le pas en 2019. Signes que la simulation et l’interprofessionnalité ont définitivement leur place tout au long des carrières des professionnels de la santé !

Une nouvelle convention Les HUG disposaient depuis 2007 d’une structure dédiée à la simulation axée sur les soins aigus, SimulHUG. Aujourd’hui, grâce à la signature d’une nouvelle convention réunissant 4 des principaux acteurs étatiques de la santé à Genève, SimulHUG s’intègre entièrement dans le CiS et permet une mutualisation unique des équipements et des savoir-faire. Les HUG apportent leur expérience dans la formation en soins aigus, et le CiS son expertise de la formation pré-graduée, de l’entraînement à la communication ainsi que des techniques faisant appel aux patients simulés. Il s’agit ainsi de regrouper des compétences autour de la simulation, avec une suite logique et pertinente de formations. Imad, dans un contexte de prise en charge domiciliaire, apporte pour sa part une dimension plus globale dans son approche de la prise en charge des patients. Les soignants sont en effet confrontés à des problématiques différentes, avec la particularité d’un travail en réseau. «Dans cette démarche interprofessionnelle, le CiS est un espace décloisonné où l’on peut innover. On mélange aussi les enseignants, ce qui était encore impensable il y a 5 ans», souligne Elisabeth van Gessel, directrice du CiS.

Cette évolution des soins, où le maintien à domicile est beaucoup plus présent qu’auparavant, impose également aux professionnels de savoir se parler, mais aussi de pouvoir partager les mêmes données. «En soutien à l’interprofessionnalité vient le développement du e-health, des outils formidables pour coordonner les soins même sans se voir. L’innovation fait évoluer les pratiques», souligne Petra Mèche.

Choisir la bonne technique
En 1999, un rapport de l’Institut de médecine américain fait l’effet d’une bombe. D’après ses auteurs, les erreurs médicales tueraient plus que les accidents de la route. Et dans la moitié des cas, le manque de communication au sein de l’équipe médicale était pointé du doigt. Des recommandations sont alors émises, insistant sur la nécessité de former les professionnels de la santé à la communication, y compris par l’utilisation de la simulation. En effet, les outils de simulation avaient déjà fait leurs preuves dans d’autres domaines à haut risque, comme l’aviation. Cette prise de conscience atteint égale-ment le grand public, qui exige de plus en plus que les patients prennent une part ac-tive dans la stratégie de soins. Après tout, ils sont les premiers concernés. La communication et la collaboration constituent ainsi des éléments critiques en clinique, mais souvent sous-estimés et rarement enseignés formellement. Les mises en situation permettent d’entraîner ces compétences: il s’agit d’apprendre à mieux communiquer, à transmettre les informations de manière structurée, mais aussi d’affirmation de soi au sein d’une équipe et de la hiérarchie, et à l’inverse d’écouter. «Ces compétences ne sont pas innées. Comme tout, cela s’apprend!», insiste Georges Savoldelli, professeur à la Faculté de médecine de l’UNIGE et responsable du programme SimulHUG adulte.

Des scénarios plus vrais que nature
Lorsque que l’on pénètre dans le CiS, on entre dans un univers à première vue très high-tech, fait de salles équipées de caméras sophistiquées, de mannequins hyper-réalistes et de salles de contrôle permettant de piloter à distance et en direct le déroulé des exercices de simulation. «Le concept: faire «vrai»! Très vite, nos étudiants oublient qu’ils font face à des mannequins ou des acteurs. Par contre, monter un scénario crédible prend du temps. Pour une heure de simulation, on compte 5 heures de travail préparatoire, y compris la programmation et la phase de test. Si notre bibliothèque de scénarios commence à être bien fournie, nous devons néanmoins sans cesse nous renouveler», explique Patricia Picchiottino. Le CiS est un outil qui permet aussi de revenir sur un incident clinique ou un fait inhabituel, afin de mieux comprendre ce qui s’est passé et apprendre de ces expériences. «Nous glissons aussi volontairement des erreurs dans la prise en charge du patient, afin de voir si et comment l’équipe la détecte et la corrige», indique Georges Savoldelli. «La simulation permet en outre de mettre sur pied des procé- dures, de les tester et de les entraîner avant de les mettre en pratique sur des patients.» La simulation comprend ainsi un éventail de techniques allant du mannequin à un acteur, en passant par du latex simulant la texture de la peau. Selon les compétences que l’on veut enseigner et le public cible, on utilise l’une ou l’autre de ces techniques.

Mesurer l’impact
La simulation semble donc être un formidable outil d’apprentissage. Quel est son impact réel sur la formation et, in fine, la sé- curité des patients? Il est extrêmement difficile de mesurer l’impact d’une formation.Georges Savoldelli indique ainsi: «Dans le même esprit, la Faculté de médecine a ré- formé sa pédagogie il y a maintenant 20 ans en passant à un apprentissage par problème, mais est-ce que les médecins en sont meilleurs? Nous pensons que oui, mais il est extrêmement difficile de le prouver scientifiquement.» Indéniablement, les formations par simulation plaisent aux participants, dont tous sont convaincus de la nécessité. Mais dans quelle mesure les comportements changent-ils après ces formations? Est-ce que cela a un effet quantifiable sur la santé et la sécurité des patients? Le domaine de l’aviation, qui utilise très largement la simulation dans la formation du personnel de vol, a vu des progrès dans la sécurité faire un bond très important au cours des dernières décennies. Si aucune étude ne peut imputer ce bénéfice à la simulation, personne ne remet en question ce type formation. « En médecine, où nous voulons toujours tout prouver, de plus en plus d’études cherchent à évaluer l’impact des formations interprofessionnelles et de la simulation. Nous nous y mettons également: Arrivé de Berne, Christoph Huber est depuis près d’un an le chef du Service de chirurgie cardio-vasculaire des HUG et professeur au Département de chirurgie. L’occasion, aujourd’hui, d’explorer avec lui ses ambitions, tant locales qu’au-delà des frontières genevoises. Professeur, pourquoi cette installation à Genève? Il n’y a que 5 centres universitaires en Suisse, les opportunités de prendre la tête d’un service tel que celui-ci, qui réunit la chirurgie cadiaque et la chirurgie vasculaire, sont donc plutôt rares! La décision a été vite prise, d’autant que la ville est aussi très attrayante. A quoi avez-vous occupé ces premiers mois dans vos nouvelles fonctions ? transversales, et profiter des liens translationnels que rendent possibles les laboratoires de médecine fondamentale installés au CMU. Cependant, l’un des premiers projets du service reste assez technique: il concerne l’assistance car - diaque, de petites pompes implantées chez des patients dont le cœur a besoin d’un coup de pouce. Un problème majeur est qu’ils génèrent un flux continu, et non pulsatile comme le fait naturellement notre cœur. Cela a pour conséquence de modifier la composition moléculaire du facteur von Willebrand, un procoagulant responsable de la solidité des vaisseaux sanguins. Quand il est altéré, des malformations artério-veineuses peuvent apparaître, créant un risque d’hémorragie interne. Le plus récent de ces dispositifs mis sur le marché, HeartMate3TM, vise à nous avons soumis un projet important à l’OFSP, et nous voulons par ailleurs mesurer le ressenti des patients, en analysant par exemple la typologie des plaintes émises par les patients aux HUG, et son évolution», ajoute Elisabeth van Gessel. En formant les futurs professionnels comme ceux déjà en exercice, tant en milieu hospitalier que dans le contexte des soins à domicile et des établissements mé- dico-sociaux, le CiS veut donc renforcer, tout au long des carrières médicales et soignantes, les pratiques collaboratives et l’habitude de travailler ensemble. Il s’agit d’un véritable changement de culture, une prise de conscience de tous les professionnels de la santé de la nécessité de se parler. Agé d’à peine 3 ans, le CiS dépasse déjà les pronostics les plus favorables.

Tiré de la Newsletter de médecine, mai 2017


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