Il y a 50 ans, quelques amis, coéquipiers d’une équipe d’aviron, commencent à faire de l’art de la même manière qu’ils pratiquent le sport : collectivement, et armés d’une insouciance empruntée à l’air du temps. Avec un état d’esprit proche de Fluxus, ils mettent sur pied des performances et installations dans des locaux désaffectés, des caves, la rue, et trompent ainsi l’absence de l’art contemporain à Genève. Il faudra cependant attendre 1973 avant que ces jeunes artistes investissent, six ans durant, une arcade en ville où ils monteront des expositions personnelles ou avec des invités internationaux, une librairie, une maison d’édition-imprimerie et un salon de thé : c’est la « galerie » Ecart, cogérée par ses fondateurs John M Armleder, Patrick Lucchini et Claude Rychner, qui œuvrent à l’ombre des institutions marchandes et muséales.
Les multiples activités du groupe Ecart ont laissé derrière elles une vaste accumulation documentaire. La HEAD – Genève, en collaboration avec le MAMCO, a entrepris de trier et d’inventorier cette archive dans le cadre d’un projet de recherche de deux ans, « Ecart, 1969-1982. Une archive collective ». Ce projet vise à mettre en valeur l’histoire discrète d’Ecart dans le contexte des néo-avant-gardes des années 1970 en appliquant à son archive, d’une part, une approche historique, mais aussi, d’autre part, en l’envisageant comme matériau de création. À l’archivage s’ajoute la préparation de publications : celle de l’unique livre de référence sur Ecart, réédité, complété et traduit en anglais, mais aussi celle d’un ouvrage inédit. Enfin, la mise en œuvre d’expositions au MAMCO, ou encore de vidéos recueillant les « archives orales » d’Ecart, permettent de mettre en récit cette aventure collective, ici transmise par John M Armleder, qui revient sur les prémisses du groupe genevois.